Une énigme en granit venue de Bretagne, via la Tunisie, et qui finit sa route à Notre-Dame du Mai… Voici le récit étonnant d’un calvaire voyageur.

Le calvaire de notre Dame du Mai – CREDIT : Var Actu

le calvaire de notre Dame du Mai

Une apparition granitique en pleine garrigue

Lorsque l’on emprunte les sentiers qui mènent à Notre-Dame du Mai, sur la presqu’île du Cap Sicié, entre Six-Fours-les-Plages et La Seyne-sur-Mer, on ne s’attend pas à croiser un pan de Bretagne figé dans le granit. Et pourtant, trônant face à la mer, tel un guetteur éternel, un calvaire breton défie les îles des Embiez. Un détail curieux attire l’œil des promeneurs. Qui a bien pu planter là, à flanc de falaise varoise, ce monument typiquement breton ?

Une enquête qui mène… en Tunisie !

Le mystère s’épaissit lorsqu’on découvre que ce calvaire n’a pas été sculpté dans une carrière varoise mais bien dans le granit de Kerventon, en Bretagne. L’auteur de l’œuvre ? Un certain Monsieur Ruz, sculpteur habile et fier de ses racines. En 1951, il façonne cette œuvre religieuse avec le soutien d’une communauté bien éloignée des côtes armoricaines : les Bretons de Tunisie.

En 1952, c’est à La Pêcherie, un village de pêcheurs près de Bizerte, que le calvaire est érigé. Là-bas, les Bretons expatriés mettent la main à la poche et financent l’intégralité du monument. Le 30 novembre, une grande cérémonie est organisée. Monseigneur Fauvel, évêque de Quimper, traverse la Méditerranée pour bénir l’œuvre. En costumes traditionnels, les Bretons de Tunisie proclament une déclaration d’amour à leurs origines.

Retour vers le futur : cap sur le Var

Mais en 1962, les vents de l’Histoire forcent les Bretons de Tunisie à quitter le pays. Le calvaire, fidèle compagnon de leurs racines, embarque à bord de « La Jeanne » pour regagner la France. Après quelques années d’errance, c’est en 1969 qu’il trouve refuge sur notre littoral varois, sur les hauteurs de Notre-Dame du Mai.

Le diocèse accepte ce don chargé d’histoire et lui offre un cadre à la hauteur de sa dimension symbolique : un lieu de pèlerinage, de silence et de contemplation face à la Méditerranée.

Un monument témoin de la mémoire des exilés

Plus qu’un simple calvaire, ce monument est un trait d’union entre trois rives : la Bretagne natale, la Tunisie de l’exil, et le Var comme terre d’accueil. Il raconte une histoire de foi, d’identité et de transmission. Il vient d’être rénové. Aujourd’hui encore, il veille sur les promeneurs et rappelle, à qui sait l’écouter, que l’histoire ne se lit pas toujours dans les livres… parfois, elle se sculpte dans le granit.